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Quels usages et quelles perspectives de développement de l’intelligence artificielle au Maroc ?

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Quels usages et quelles perspectives de développement de l’intelligence artificielle au Maroc ?

Le présent avis vient en complément de l’auto-saisine « vers une transformation digitale responsable et inclusive », adoptée en 2021, plus spécifiquement sa préconisation de faire de l’intelligence artificielle (IA) une priorité nationale dans le cadre de la transformation digitale. Sont ainsi mis en lumière les facteurs favorisant l’adoption et le déploiement de l’IA, ainsi que ses usages et les perspectives de son développement au Maroc. L’avis a été adopté à l’unanimité par l’Assemblée Générale du Conseil, tenue le 27 juin 2024.

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Le présent avis vient en complément de l’auto-saisine « vers une transformation digitale responsable et inclusive », adoptée en 2021, plus spécifiquement sa préconisation de faire de l’intelligence artificielle (IA) une priorité nationale dans le cadre de la transformation digitale. Sont ainsi mis en lumière les facteurs favorisant l’adoption et le déploiement de l’IA, ainsi que ses usages et les perspectives de son développement au Maroc. L’avis a été adopté à l’unanimité par l’Assemblée Générale du Conseil, tenue le 27 juin 2024.

L’IA occupe une place centrale dans la transformation digitale, tant par son apport aux secteurs productifs que par ses effets sur les économies et les sociétés. Ses avancées, notamment dans le domaine de l’IA générative, la positionnent non seulement comme un catalyseur de croissance économique, mais également comme un levier essentiel pour améliorer des services essentiels, tels que la santé et l’éducation, en les rendant plus accessibles, efficaces et personnalisés. Des études documentées prévoient que l’IA pourrait augmenter le PIB mondial de 14 % d’ici 2030, tout en contribuant significativement à l’atteinte de 79 % des objectifs de développement durable.

Toutefois, l’adoption de l’IA soulève un ensemble défis majeurs. Au plan éthique, les risques liés à la gestion des données personnelles sont considérables, compte tenu du volume massif d’informations collectées. De plus, les algorithmes peuvent parfois reproduire des biais et partant induire des décisions injustes ou discriminatoires. Au plan social, l’impact de l’IA sur l’emploi suscite des préoccupations, notamment avec la transformation ou la disparition de certains métiers.

Le Maroc possède des atouts importants pour se positionner dans le domaine de l’IA, avec des lois encadrant des aspects-clés du numérique comme la cybersécurité et la protection des consommateurs. Des initiatives, telles que le centre « AI movement » à l’UM6P, l’appel à projets « al khawarizmi », ainsi que d’autres portées par des écoles d›ingénieurs et certains départements ministériels, témoignent de la volonté d’impulser une dynamique dans le domaine de l’IA. Au niveau international, le Maroc s’engage activement pour une IA éthique et responsable, en adoptant les recommandations de l’UNESCO et en co-parrainant une résolution des Nations Unies sur l’IA au service du développement durable.

Cependant, des obstacles subsistent, notamment l’absence d’un cadre réglementaire spécifique et la libération poussive des données publiques. En outre, les startups spécialisées en IA rencontrent des difficultés d’accès aux financements, les critères d’éligibilité étant souvent inadaptés à leurs besoins spécifiques. Le manque patent de compétences et de formateurs qualifiés entrave également le développement d’un écosystème d’IA performant. De surcroît et nonobstant des initiatives isolées en R&D, le manque de synergie entre les projets et leur inadéquation avec les besoins industriels, en l’absence d’une vision nationale claire et cohérente, hypothèquent la mise en place de solutions alignées sur les priorités économiques du pays.

Partant de ce diagnostic, le CESE appelle à mettre en place une stratégie nationale d’utilisation et de développement de l’IA alignée avec les ambitions du pays. La finalité ultime est de bâtir un écosystème capable d’une part de favoriser une utilisation large de l’IA au niveau national et, d’autre part, de créer les conditions pour le développement, d’ici 2030, d’une industrie nationale de l’IA, en encourageant la création et le développement de startups et d’entreprises innovantes, avec le soutien des investissements nationaux et internationaux. Cet écosystème devrait favoriser le développement des produits et services potentiellement exportables, en veillant à assurer une utilisation éthique et responsable de l’IA dans tous les secteurs.

Dans ce sens, le CESE a émis un ensemble de recommandations, dont il est permis de citer :

  • Réviser la loi 09-08 relative à la protection des données personnelles afin qu’elle intègre valablement les exigences des données utilisées et générées par l’IA, tout en garantissant sa conformité avec les normes internationales.
  • Encourager l’usage raisonné d’outils IA dans tous les secteurs, aussi bien publics que privés, en développant un plan de soutien dédié, notamment pour les PME et TPE, incluant des volets de formation ainsi que des dispositifs d’accès aux ressources financières, matérielles et logicielles.
  • Libérer les données publiques et faciliter l’accès à des données fiables et interopérables pour disposer des informations nécessaires au développement d’applications d’IA.
  • Créer un fonds d’investissement public-privé dédié à l’innovation dans l’intelligence artificielle et les technologies numériques avancées, incluant des subventions, des fonds d’amorçage et du capital-risque pour soutenir les projets en IA.
  • Prévoir des incitations fiscales au profit des entreprises, notamment les TPE et PME qui développent l’IA, l’utilisent pour améliorer leur productivité ou collaborent avec le secteur de la recherche en IA. Il est également nécessaire d’adapter la charte d’investissement pour mieux répondre aux spécificités des startups en IA, en révisant les critères d’éligibilité actuels.
  • Prioriser les efforts de développement de solutions à base de technologies IA pour deux ou trois secteurs au maximum pour éviter la dispersion des ressources. L’éducation, la santé et l’agriculture pourraient figurer parmi ces secteurs.
  • Développer un modèle de langage souverain (données en darija) pour améliorer l’inclusion numérique en permettant à tous les citoyens, quel que soit leur niveau d’éducation, de participer activement aux interactions numériques et étendre ainsi l’accès à l’IA à l’ensemble de la population.
  • Intégrer systématiquement la formation en IA dans l’offre éducative nationale et renforcer les programmes d’enseignement supérieur en IA dans les universités et écoles spécialisées. En parallèle, combler le manque de formateurs en proposant aux profils scientifiques, tels que les mathématiciens, une formation spécialisée en IA.