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Le foncier au Maroc

LE FONCIER AU MAROC
Synthèse

Le foncier joue un rôle-clé dans le développement économique, la réduction des disparités spatiales et le renforcement de la justice sociale. Mais eu égard aux insuffisances qui caractérisent les règles posées par les textes législatifs et réglementaires en ce qui concerne la protection des droits fonciers, un sentiment d’iniquité s’est graduellement développé au sein de la population. Ce sentiment est également nourri par les logiques spéculatives parfois constatées et les carences qui entachent la mise en œuvre des politiques publiques relatives au foncier au regard des exigences de développement économique, social et environnemental de notre pays.

En effet, malgré les réformes et les initiatives entreprises dans ce domaine, le CESE relève une absence de cadre stratégique commun pour mettre en cohérence et orienter efficacement les politiques publiques en lien avec le foncier. Par ailleurs, en dépit des efforts publics consentis jusqu’à présent, des contraintes importantes subsistent en ce qui concerne l’harmonisation et la convergence des objectifs et des actions, dues notamment à la multiplicité des intervenants, à la diversité des statuts juridiques et à l’absence de mécanismes efficaces de coordination décentralisée en matière d’action foncière.

Sur la base de ces constats, le CESE propose quatre orientations stratégiques englobant chacune une série de mesures à même de permettre une modernisation du dispositif global régissant le foncier tout en maintenant les équilibres qui le fondent. L’objectif d’une telle démarche est, in fine, de répondre efficacement aux besoins pressants de sécurisation de la propriété, de régulation du marché foncier et d’amélioration du système d’information foncière.

La première orientation préconise l’aménagement d’espaces urbains libres de toute contrainte au développement, attractifs pour l’investissement productif et offrant des logements décents et accessibles, en veillant notamment à :

  • utiliser les outils d’action foncière pour produire du foncier destiné au développement de l’habitat moyen standing, soutenus par des mesures incitatives, en assurant un suivi rigoureux afin de se prémunir contre tout comportement de prédation ;
  • recourir au remembrement dans les zones péri-urbaines, selon des procédures transparentes garantissant l’accès de tous à l’information, dans l’objectif de favoriser une intervention publique à même d’accélérer l’ouverture à l’urbanisation.

La deuxième orientation prône la valorisation des espaces agricoles et ruraux sur la base de la sécurisation et la garantie des droits individuels et collectifs. Parmi les mesures proposées, il conviendrait de :

  • reconnaitre des droits fonciers élargis au principe d’une exploitation paisible ou de jouissance perpétuelle sur la base de l’état parcellaire, puis adopter et autoriser la création de droits secondaires (location, cession, échanges, etc.);
  • procéder à une régularisation progressive du foncier résidentiel  des zones d’habitat irrégulier en renforçant, dans un premier temps, les droits exercés sur les résidences par des baux de longue durée renouvelables pour, in fine, reconnaitre la propriété selon des modalités à définir.
La troisième orientation va dans le sens de la mise en place d’un cadre juridique qui garantit la sécurité de la propriété tout en prenant en compte les spécificités et les rôles respectifs de chacun des régimes fonciers. Parmi les mesures proposées, il conviendrait de :
  • reconnaitre et protéger les divers droits fonciers acquis légitimement mais non conformes à la loi (cessions de gré à gré, baux de longue durée, « tanazoul », etc.), au même titre que les droits issus de régimes bénéficiant de protections inscrites dans les lois ;
  • consolider et unifier le cadre juridique régissant le foncier par la création d’un «Code Foncier», qui comprendrait les règles communes à tous les statuts fonciers, ainsi que d’autres règles spécifiques applicables à certains types et statuts du foncier.

La quatrième orientation vise à asseoir une gouvernance foncière efficace qui, aux niveaux national et régional, est dotée d’instruments à même de répondre aux évolutions de la demande. Parmi les mesures proposées, il conviendrait de :

  • mettre en place, à côté du cadastre juridique relatif aux terrains immatriculés, un cadastre national couvrant l’ensemble du territoire national, en activant le cadre légal y afférent, tout en prévoyant, à terme, de développer un cadastre universel sur lequel figureraient toutes les informations nécessaires à une gestion efficiente de la ressource foncière ;
  • renforcer la coordination de l’action foncière, à travers une institution dédiée qui devra être investie de larges pouvoirs ;
  • mettre en place une fiscalité adaptée et évolutive, adossée à une information accessible et transparente, pour pénaliser les comportements spéculatifs, en adoptant un impôt sur le patrimoine non générateur de richesse.

Une réforme réussie de la politique foncière du pays, génératrice de richesses et socialement acceptable, nécessite d’anticiper les différentes formes de résistance, aussi bien sociales que politiques, susceptibles d’entraver la mise en œuvre harmonieuse de la nouvelle stratégie foncière. Elle requiert également une priorisation dans la mise en œuvre des mesures, en se focalisant sur les « quick wins» et les priorités des parties prenantes institutionnelles, tout en s’inscrivant dans une logique de long terme pour faire du foncier un véritable levier de développement.

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