Le CESE appelle dans ce rapport à une nouvelle ambition basée sur un nouveau paradigme, qui ferait de l’industrie un des piliers majeurs du développement du pays. Afin de permettre à cette ambition de prendre forme, l’articulation entre quatre dimensions engagera l’industrie nationale sur la voie du futur.
Mettre en place une gouvernance lisible et responsable: une nécessité pour concevoir et piloter l’ambition de « l’Industrie Maroc 4.0 »
La voie du futur pour l’industrie nationale nécessite une nouvelle vision qui s’appuie sur une gouvernance forte et transparente, institutionnalisant les acteurs et leurs rôles respectifs, avec des responsabilités clairement définies et totalement articulées. Ceci suppose que les acteurs soient plus forts et plus responsables pour pouvoir amener et porter cette réforme profonde du paysage industriel marocain. Il convient notamment pour cela :
- Mobiliser, fédérer et renforcer le rôle des acteurs et leur représentativité : une gouvernance institutionnalisée, lisible et responsable pour porter la vision, à travers (i) la sanctuarisation, par les textes, de la représentativité et de la légitimité des fédérations sectorielles et, (ii) le renforcement des syndicats et leur participation aux instances de représentation au sein des entreprises et des organes de pilotage des politiques industrielles;
- Institutionnaliser un organe de pilotage de haut niveau, comme plate-forme de concertation et de pilotage stratégiques;
- Favoriser l’émergence de locomotives nationales sectorielles, en mesure notamment d’être autant de «porte-étendards du dessein africain du Maroc».
Réinventer le pacte social en assurant une convergence totale entre compétitivité, flexi–Sécurité, attractivité, responsabilité et cohésion sociale
La vision avec ses orientations et besoins d’adaptation, couplés aux changements aux niveaux des systèmes de production, des relations de travail et des modes de consommation, exigent la redéfinition d’un pacte social novateur en termes de gestion des relations sociales, avec de nouvelles formes d’accompagnement des parcours et de protection des individus. Celui-ci devrait permettre de libérer les énergies aux niveaux des secteurs et des branches, de renforcer les capacités des acteurs et des employés tout en assurant une protection des personnes des vulnérabilités pouvant être induites par cette nouvelle dynamique du marché du travail. Aussi, ce pacte appelle à la mise en place d’un cadre légal, répondant à la dynamique visée, applicable et appliqué par tous et à tous, garantissant les droits fondamentaux, en conformité avec la Constitution, la Charte Sociale du CESE et les conventions internationales ratifiées par le Maroc.
Il convient notamment pour cela de :
- Changer de paradigme: priorité à l’emploi décent et réforme du système de protection sociale pour une généralisation de la couverture à tous les citoyens;
- Aboutir à des accords forts pour une nouvelle dynamique, à la fois créatrice de richesses et d’emplois décents;
- Garantir l’adaptation et le renforcement des capacités techniques et sociales, avec un droit à la formation tout au long de la vie;
- Construire le système qui ferait de la couverture sociale, un droit pour tous les citoyens et non seulement pour les travailleurs;
- Favoriser le développement de la culture industrielle marocaine, pour l’émergence d’une «société industrieuse»
Pour un Maroc des Régions, « Usine Verte », à l’industrie connectée, dynamique, solidaire et inclusive
Pour réussir cette nouvelle construction, la conception d’une politique industrielle nationale doit être adossée à une déclinaison territoriale pour assurer un développement fort et équilibré sur l’ensemble du territoire national, pour lequel la Région doit être le maillon essentiel en charge de cette déclinaison. Il convient notamment pour cela de:
- Mobiliser toutes les potentialités pour que les Régions puissent jouer pleinement leur rôle de développement industriel dans le cadre de leurs nouvelles missions. Pour cela, il est question de rendre effectif le cadre institutionnel pour ancrer une véritable approche participative au niveau régional, avec une large implication des acteurs et des représentants de la société dans tout le processus de développement ;
- Lier les recettes de la région à la production de richesses sur son territoire;
- Mettre en place une politique foncière proactive de l’Etat et des régions par le développement des zones d’activités et zones industrielles, et de logistique au niveau d’infrastructures stratégiques, sous la responsabilité directe des régions;
- Intégrer la dimension durabilité et décliner l’ambition d’un Maroc «usine verte» dans une politique d’une nouvelle génération de zones industrielles;
- Créer un statut spécifique d’aménageur de zone industrielle et d’opérateur environnemental adapté aux vocations de ces dernières;
- Mettre fin aux redondances administratives en matière de pilotage, d’appui et de suivi des investissements.
Libérer les énergies et les initiatives, encourager l’investissement et densifier le tissu industriel
L’émergence d’une nation industrielle requiert la réunion des conditions favorables à un environnement de facilitation, d’accompagnement, d’ouverture des opportunités et de renforcement des capacités, à travers la définition d’un ensemble de mesures pour répondre aux défis du futur et densifier l’investissement et la production nationale.
Pour cela, il est nécessaire notamment de :
- assurer l’effectivité du champ de l’investissement à de nouveaux profils d’acteurs industriels, afin de densifier le tissu industriel, diversifier l’offre et accroître la valeur ajoutée;
- aire de l’amélioration de l’attractivité et du climat des affaires une priorité nationale, pour sortir d’une économie à prédominance rente vers une économie inclusive et plus productrice de valeur;
- procéder à une réforme fiscale pour assurer la cohérence, donner de la visibilité et sortir des dérogations improductives au profit de l’investissement producteur de valeur ajoutée nationale et d’emplois;
- adopter une politique nationale active et coordonnée d’innovation et de veille stratégique, pour une industrie nationale qui intègre les tendances fortes et se positionne durablement sur les chaines de production mondiales;
- favoriser l’émergence de nouveaux instruments pour la mise à disposition de foncier industriel à prix compétitif;
- faire de la digitalisation un axe majeur du développement de l’industrie;
- encourager le développement d’une filière d’ingénierie nationale au service de la performance industrielle;
- adapter, approfondir et généraliser la démarche de normalisation pour protéger le marché national et soutenir la compétitivité de l’offre marocaine;
- faire de l’industrie un levier du soft power du Maroc et valoriser la marque «Made in Morocco».