CESE

Rapport annuel

Rapport annuel 2021

Conformément à la loi organique régissant le Conseil Economique, Social et Environnemental (CESE), le rapport du Conseil comporte une analyse de la situation économique, sociale et environnementale de notre pays ainsi qu’une présentation des activités du Conseil pour l’année 2021.
Le Conseil procède à un examen des principales évolutions sur les plans économique, social et environnemental, tout en proposant un certain nombre de recommandations et d’orientations en matière de politiques publiques. Cet examen représente le point de vue de la société civile organisée, riche par la diversité des orientations et des expériences professionnelles et sociales des différentes catégories composant le Conseil.

Synthèse

L’année 2021 a été marquée par une dynamique de relance économique tant au niveau national qu’international, vu qu’elle succède à une année de crise sévère aux effets paralysants à tous les niveaux. 

Sur la scène mondiale, la croissance économique a repris (+6,1%) après une forte récession en 2020 (-3,1%). Le rythme de reprise, conditionné par la capacité budgétaire et logistique des pays, a toutefois connu un ralentissement au cours des derniers mois de l’année, en raison notamment, de la survenance de la vague OMICRON, mais également la persistance de goulets d’étranglement au niveau du fret et de la logistique de transport international. Parallèlement, la même année a connu un choc majeur au niveau du marché des matières premières énergétiques et alimentaires, avec des hausses de prix généralisées et persistantes, aussi bien dans les pays avancés que dans ceux en voie de développement.

Au niveau national, les évolutions constatées durant l’année 2021 ont permis d’apprécier le niveau de résilience de notre économie après une année 2020 caractérisée par une chute brutale du PIB, induite par les effets de la crise de la covid-19. En effet, 2021 a connu un net rebond économique (7,9%), suite notamment, à une très bonne campagne agricole et à la forte reprise de l’activité économique dans les différents secteurs, exceptions faites des secteurs du tourisme, de l’hébergement, de la restauration et du transport.

Selon les prévisions établies en décembre 2021, le taux de croissance avoisinerait 2,9% en 2022 (données de BAM). Il est à signaler que ce taux, a été corrigé, au cours de l’année 2022, pour s’établir autour d’une moyenne de 1,2%, selon les institutions nationales et internationales. Cette régression pourrait s’expliquer par les répercussions de la guerre en Ukraine qui viennent s’ajouter aux effets de la sécheresse sévère que connait le pays. Dans ces conditions, le PIB par habitant risque de ne retrouver son niveau d’avant-crise qu’en 2023, ce qui requiert de redoubler d’effort pour éviter tout retard en termes d’atteinte de la cible du NMD qui vise à doubler, en 2035, le niveau du PIB par habitant de 2019.

S’agissant des autres indicateurs macroéconomiques, le déficit budgétaire a enregistré une baisse, passant de 7,1% du PIB en 2020 à 5,5% en 2021, parallèlement à un repli du ratio d’endettement du trésor de 71,1% en 2020 à 68,9% en 2021. Force est de constater que la dette du trésor demeure majoritairement de moyen long terme et que la part de la dette extérieure correspond à 23%, soit une proportion proche de celle de l’année pré-crise (21,6% en 2019). Quant au taux d’inflation, selon les données du HCP, il a doublé, passant de 0,7% en 2020 à 1,4% en 2021.

Au niveau du commerce extérieur, les importations ont enregistré, en 2021, une hausse importante traduisant le retour à la situation structurelle d’une croissance très intensive en intrants importés. Dans ce contexte et malgré une évolution favorable et généralisée des exportations, tirée en grande partie par la hausse importante des prix des phosphates et dérivés, le déficit commercial a accusé un creusement de 39 milliards de dirhams. En revanche, les recettes des MRE ont enregistré une amélioration significative de 37,5% par rapport à 2020, soit 93,7 milliards de dirhams. Les investissements directs étrangers (IDE) se sont montrés très résilients, en affichant une évolution positive de 43,6% par rapport à 2020.

Pour ce qui est de la situation du tissu productif, l’année 2021 a été marquée par la persistance des fermetures de certaines entreprises, en particulier les TPE malgré les efforts de relance des pouvoirs publics. Quant aux nouvelles créations d’entreprises, il y a lieu de noter à, cet égard, la hausse de la part des personnes morales (69%) par rapport à celle des personnes physiques (31%) dans les nouvelles créations depuis le déclenchement de la crise covid-19. Ce changement pourrait être expliqué, entre autres facteurs, par la tendance des nouveaux porteurs de projets à choisir des formes juridiques plus organisées et plus structurées, après avoir constaté les difficultés rencontrées par les entrepreneurs individuels et micro-entrepreneurs durant la crise.

S’agissant du marché du travail, et malgré les créations nettes réalisées en 2021, le taux de chômage est passé de 11,9% en 2020 à 12,3% en 2021. Le taux d’emploi demeure pour sa part, bien en-deçà de son niveau de 2019. Cette absence d’une reprise totale de l’emploi en 2021 est perçue avec plus d’acuité au niveau des secteurs les plus impactés par la crise, en particulier l’hébergement et la construction, où les effectifs ont diminué de moitié. 

Au plan social, le secteur éducatif a été marqué par la poursuite de la mise en œuvre des dispositions de la loi-cadre 51-17 relative au système d’éducation, de formation et de recherche scientifique qui s’articule autour de trois principaux axes : l’équité et l’égalité des chances, l’amélioration de la qualité de l’éducation et de la formation et la gouvernance et la mobilisation.

Par ailleurs, le déroulement de la vie scolaire au cours de l’année 2021, a été notamment marqué par le retour progressif aux cours en présentiel avec le report d’un mois de la rentrée scolaire 2021-2022, dans la cadre de la gestion proactive de la situation épidémiologique.

Il est à noter qu’en dépit des efforts déployés, le secteur de l’éducation continue de pâtir de dysfonctionnements structurels qui ont un impact négatif sur la qualité de l’apprentissage des élèves. En effet, les résultats du programme national d’évaluation des acquis (PNEA), publiés en 2021, ont permis de relever une faiblesse généralisée des acquis et des compétences linguistiques, mathématiques et scientifiques des élèves à la fin des années du primaire et du collège. Cette situation renvoie à la nécessité d’entreprendre une réforme audacieuse du secteur visant notamment, à améliorer la formation des enseignants, y compris la formation continue, tout en valorisant leur statut, la généralisation de l’enseignement préscolaire de qualité et le renforcement des apprentissages et compétences de base.

Par ailleurs, l’année 2021 a été marquée par le lancement, par Votre Majesté, du chantier structurant de la généralisation de la protection sociale. Ce chantier vise durant les cinq prochaines années :

  • la généralisation de l’assurance maladie obligatoire de base (AMO) en 2022 ;
  • la généralisation des allocations familiales durant les années 2023 et 2024 ; 
  • l’élargissement de la base des adhérents aux régimes de retraite pour inclure les personnes qui exercent un emploi et ne bénéficient d’aucune pension ; 
  • la généralisation de l’indemnité pour perte d‘emploi durant l‘année 2025 pour couvrir toute personne exerçant un emploi stable.

Plusieurs actions ont été entreprises dans le cadre de la mise en œuvre de ce chantier, notamment la publication de la loi-cadre 09-21 relative à la protection sociale et de plusieurs textes législatifs et réglementaires y afférents.  Le gouvernement a également rendu public, fin 2021, son plan de réforme du secteur de la santé afin de répondre aux insuffisances multiples du secteur. Parmi les mesures-phares dudit plan, il y a lieu de citer l’augmentation du budget de la santé publique, la généralisation progressive de la médecine de famille et le renforcement des soins maternels et infantiles. Toutefois, il serait opportun de fixer des objectifs chiffrés permettant d’évaluer la faisabilité de ce plan et d’annoncer les ressources mobilisées pour son financement.

La réussite de la généralisation de la protection sociale, projet sociétal de grande envergure, reste néanmoins tributaire de la capacité des acteurs concernés à relever, en particulier, les défis liés à la mobilisation des moyens humains et financiers nécessaires et au respect du calendrier arrêté. 

Concernant la problématique de la participation des femmes au marché du travail, force est de noter que malgré un certain redressement plutôt conjoncturel en 2021, le taux d’activité féminin demeure structurellement très faible au Maroc. Les femmes restent à la marge du développement, oscillant entre l’inactivité et le travail précaire. Parmi les facteurs de blocage qui ont suscité le débat sur la question de la participation de la femme en 2021, il y a lieu de citer, entre autres causalités, le problème du harcèlement sexuel, notamment au milieu du travail et dans les universités. Le CESE déplore les dysfonctionnements qui caractérisent le processus de dépôt de plainte contre le harcèlement sexuel des femmes qui sont souvent contraintes au silence par crainte de représailles, surtout lorsque les harceleurs ont un rapport de supériorité hiérarchique avec les victimes, ou encore en raison de la difficulté d’apporter les éléments de preuve. 

Au niveau du dialogue social aussi bien bipartite que tripartite, de même qu’au niveau des textes fondateurs des relations professionnelles, aucune avancée significative n’a été enregistrée en 2021. S’agissant de la loi organique sur la grève, prévue par la Constitution du Royaume, il est à signaler que ce texte fondateur n’a pas encore vu le jour, faute d’un consensus entre les différentes parties prenantes. 

Par ailleurs, la crise covid-19 a rappelé l’urgence d’une réforme du Code du travail qui devrait prendre en considération les mutations accélérées du marché du travail, notamment l’accompagnement de la digitalisation croissante du travail au plan juridique. En outre, cette réforme devrait renforcer la protection des droits des travailleurs et mettre en place des garde-fous pour que les crises futures ne viennent pas précariser les salariés.

Pour ce qui est de la dimension environnementale, l’année 2021 a été marquée par l’organisation de la COP 26 à Glasgow, qui a connu la participation de 196 Etats (dont le Maroc) et l’adoption du Pacte de Glasgow pour le climat. Ce dernier comprend un ensemble d’engagements, notamment en matière de renforcement de la résilience climatique, de réduction des émissions de gaz à effet de serre et de mobilisation des financements nécessaires à ces deux fins. 

Le Maroc a procédé en 2021 à l’actualisation de sa contribution déterminée nationale (CDN), en s’engageant sur une réduction inconditionnelle des gaz à effet de serre (GES) de 18,3% par rapport à son scénario de référence « business as usual » et un objectif conditionnel de réduction de 45,5% dans l’éventualité où le Maroc recevrait une aide supplémentaire de 24 milliards de dollars. 

En matière de gestion des ressources en eau, le Maroc a connu durant, les quatre dernières années, un déficit hydrique annuel oscillant entre 54% et 85%, situation alarmante qui  constitue une menace sérieuse pouvant compromettre le développement économique, social et environnemental de notre pays. Les pouvoirs publics se doivent de mener, en urgence une série de réformes en totale conformité avec les axes du programme national d’approvisionnement en eau potable et d’irrigation et les recommandations du NMD, pour améliorer la gouvernance et la gestion du secteur de l’eau, notamment au niveau du secteur de l’agriculture.

S’agissant des énergies renouvelables, la capacité installée constitue près de 38% du mix énergétique, avec une production qui ne dépasse pas 20% de l’énergie électrique totale produite au niveau national. D’où la nécessité d’accélérer le processus de développement des énergies renouvelables, tout en veillant à diversifier le bouquet énergétique. A ce titre, il est à signaler que deux feuilles de route pour la valorisation de la biomasse et de l’hydrogène vert ont été lancées par le ministère de tutelle. Les deux filières précitées mériteraient d’être développées eu égard aux opportunités qu’elles offrent en termes de lutte contre les émissions de GES, de création d’emplois et de verdissement du mix énergétique.  

La fin de l’année 2021 a été marquée également par la soumission du Maroc aux nations unies de sa stratégie bas carbone à long terme 2050. Cette nouvelle stratégie s’articule autour de sept orientations stratégiques, dont la première consiste à accélérer le développement des énergies renouvelables afin d’atteindre une part de 80%, en 2050, dans le mix énergétique. 

S’agissant de l’appréciation de la concrétisation des objectifs de développement durable (ODD) en lien avec la préservation de l’environnement, le rapport national 2021 du HCP a mis en avant une très faible amélioration des indicateurs y afférents.

A l’instar de tous les pays, le Maroc subit, à ce jour, les répercussions de la crise sanitaire qui s’est muée en crise économique et sociale profonde aux séquelles aussi graves que multiformes. Dans ce contexte, le Conseil a dégagé, à la lumière des évolutions récentes aux plans économique, social et environnemental, un ensemble de points de vigilance de portées conjoncturelle et structurelle. 

Le premier point de vigilance a trait au choc inflationniste récent qu’a connu le Maroc et qui a occasionné des pertes significatives en termes de pouvoir d’achat. 

Pour notre pays, les hausses importantes de prix observées récemment demeurent majoritairement d’origine externe. Cela n’empêche pas toutefois de relever des effets amplificateurs au niveau interne, en particulier, la problématique du manque d’organisation des marchés des produits agricoles et la multiplicité des intermédiaires. 

Concernant les prix des hydrocarbures, les pouvoirs publics a certes pris des mesures de court terme afin de préserver le pouvoir d’achat des consommateurs et la compétitivité des entreprises marocaines, mais la situation actuelle requiert d’engager des mesures à plus fort impact. 

Pour réduire l’impact des poussées inflationnistes que connait notre pays, le CESE a formulé un ensemble de recommandations, à court et moyen termes.

S’agissant des actions à caractère immédiat, il convient d’envisager la distribution d’aides ciblées aux catégories les plus vulnérables, le maintien des droits de douane sur certains produits de base importés à des niveaux bas, ainsi que le renforcement du contrôle du respect de la concurrence dans les différents secteurs, en particulier ceux relatifs aux biens de première nécessité et produits de base, avec des sanctions suffisamment dissuasives en cas d’infractions.  

A moyen terme, et dans l’objectif de contenir les futures phases de flambée des prix, le CESE préconise, notamment, de : 

  • accélérer la mise en place du registre social unifié (RSU) pour un ciblage optimal des aides aux plus défavorisés ; 
  • étudier la possibilité de création d’un fonds permanent de stabilisation face aux chocs majeurs ;
  • investir davantage dans les capacités de stockage internes des produits énergétiques et d’envisager les modalités possibles d’une mobilisation des capacités de stockage de la SAMIR ;
  • procéder à la réforme et à l’organisation des espaces de commercialisation des produits agricoles ;
  • étudier la faisabilité de création d’une compagnie nationale de transport maritime de marchandises ;
  •  mettre en place un observatoire des prix et des marges des produits de base et de première nécessité. 
  • Le deuxième point de vigilance est relatif à la nécessité de mettre en place les conditions à même de favoriser le développement d’une industrie pharmaceutique nationale compétitive et concurrentielle pour améliorer la souveraineté sanitaire du pays. En partant d’une analyse des dysfonctionnements qui caractérisent le secteur au Maroc, le CESE recommande en priorité de :
  • adapter le cadre réglementaire dans le but de fluidifier le processus de développement de nouveaux produits, notamment dans le domaine du générique ou du bio-similaire ;
  • instaurer une préférence nationale en faveur des produits fabriqués localement avec un taux de valeur ajoutée domestique minimum à respecter ;
  • réduire les délais réglementaires de traitement des autorisations de mise sur le marché (AMM) pour les médicaments, veiller au strict respect de ces délais et dématérialiser le processus d’enregistrement et d’octroi desdites autorisations ;
  • garantir le respect strict des règles de concurrence saine et veiller à ce que les sanctions en cas d’infraction soient suffisamment dissuasives ;
  • réviser l’approche et le benchmark utilisé pour la fixation des prix de référence des médicaments et renforcer les capacités des services chargés de collecter, traiter et vérifier l’information nécessaire pour définir des niveaux de prix adéquats.

Le troisième point de vigilance adresse la nécessité d’une transformation de l’écosystème agricole, porteuse d’inclusion et de résilience, eu égard aux sécheresses récurrentes qui menacent la production agricole et la sécurité alimentaire du pays, nourrissent sa dépendance aux importations alimentaires et fragilisent la situation de populations rurales, fortement dépendantes des activités agricoles.  

Ainsi, et dans le but d’agir efficacement sur les principales sources de vulnérabilité patente de l’écosystème agricole et des petits agriculteurs aux aléas climatiques, le CESE propose les recommandations suivantes :

  • étudier la faisabilité de l’introduction de variétés de céréales plus résistantes à la sécheresse, notamment celles répandues en Afrique (millet, sorgho, etc.) et accorder plus d’importance à la culture de l’orge, avec toutes les subventions et incitations requises pour développer ces cultures ;
  • accorder une place centrale à la R&D dans le domaine de la sélection des semences et des cultures les plus résistantes à la sécheresse, ainsi que celui lié à l’utilisation des engrais et de l’irrigation. Cela requiert de renforcer le budget de la recherche dans ces domaines et les ressources financières et humaines des instituts de recherche spécialisés ;
  • améliorer l’accessibilité des agriculteurs aux intrants et semences sélectionnées ;
  • mettre en œuvre une politique de sensibilisation élargie et de proximité sur la nécessité de rationalisation de la consommation d’eau et réorienter les cultures pour réduire les exportations d’eau « virtuelle » ;
  • asseoir une résilience des revenus des ruraux face aux chocs climatiques via (i) la mise en place de plans ruraux pour la diversification des activités économiques vers des branches non-agricoles, (ii) un soutien plus poussé à l’industrie agroalimentaire pour une meilleure valorisation des produits agricoles, (iii) une révision approfondie de la formule d’agrégation dans l’agriculture, (iv) une réduction du coût des intrants pour les agriculteurs via des subventions adaptées durant les périodes de renchérissement excessif.

En matière de gouvernance, il est impératif qu’une évaluation ex-ante du plan « génération green » soit faite et que des évaluations intermédiaires soient programmées au fur et à mesure de l’avancement de la déclinaison dudit plan et ce, par des entités indépendantes.

S’agissant du quatrième point de vigilance, il a été consacré au sujet de la retraite, en insistant sur la nécessité d’une accélération de la mise en œuvre de la réforme structurelle et globale du secteur. A cet égard, le CESE préconise plusieurs actions dont celles de :

  • procéder, en concertation avec les partenaires socio-économiques, à l’élaboration en urgence d’un échéancier précis et engageant pour les différentes parties, relatif à la mise en œuvre des étapes majeures de la réforme ;
  • promulguer les textes législatifs et réglementaires nécessaires pour assurer la convergence des régimes de retraite ; 
  • procéder, dans une étape ultérieure, et selon le calendrier défini dans le cadre de la réforme globale, à l’instauration d’un régime national de retraite unifié, basé sur trois piliers : (i) un régime obligatoire de base, géré en répartition, réunissant les actifs des secteurs public et privé et les non-salariés, (ii) un régime complémentaire obligatoire contributif pour les revenus supérieurs au plafond et (iii) un régime individuel facultatif en capitalisation qui relèverait de l’assurance privée ;
  • instaurer un « revenu minimum vieillesse » qui ne soit pas inférieur au seuil de pauvreté ; 
  • prévoir, par la force de la loi, des dispositifs de gouvernance et de pilotage efficace des régimes de retraite pour assurer leur pérennité et leur adéquation au vu des évolutions financières, économiques sociales et démographiques ;

Sur le plan du financement : (i) prendre en considération les capacités de financement des employeurs et la capacité de contribution des affiliés (ii) revoir la politique de placement des fonds de réserves dans le cadre d’une approche unifiée en termes de finalités, d’impacts, de gestion ou de contrôle et (iii) consacrer deux à quatre (2 à 4) points de la TVA au financement de la protection sociale, y compris les régimes de retraite.

Le dernier point de vigilance du présent rapport, a pour sa part, été consacré à la question de la transition énergétique en tant que chantier stratégique dont la réussite pourrait contribuer fortement au développement économique social et environnemental du Maroc. Le CESE a relevé, à cet égard, que la mise en œuvre de la stratégie énergétique de 2009 a accusé des retards, notamment ses cibles de résultats en terme de développement des énergies renouvelables et d’efficacité énergétique. Devant des crises successives, de la crise sanitaire à la crise énergétique actuelle, la vulnérabilité du secteur énergétique s’est accentuée, impactant fortement le pouvoir d’achat des consommateurs marocains, le tissu économique et la balance des paiements du pays, et menaçant sa souveraineté énergétique. En outre, le secteur énergétique, notamment celui  des énergies renouvelables, souffre aujourd’hui du manque d’un pilotage stratégique avec des actions coordonnées et convergentes entre les différents acteurs concernés et ce, parallèlement à l’existence d’un arsenal juridique inadapté. 

Dans ce contexte, le mix énergétique marocain reste encore dominé par les énergies fossiles et son verdissement peine à avancer significativement. 

Tenant compte de cette situation, le Maroc doit entamer en urgence les réformes nécessaires, tout en évaluant avec prudence les différents choix d’investissements qu’il compte prendre dans le futur pour réussir sa transition énergétique et électrifier son économie. A cet effet, le CESE recommande de :

  • Mettre en place, sur la base d’une approche concertée, une stratégie nationale renouvelée de l’énergie, en totale conformité avec les recommandations du nouveau modèle de développement. Il convient pour cela de :
  • mettre en place une nouvelle architecture institutionnelle du secteur de l’énergie autour d’un régulateur fort et indépendant ;
  • redéfinir le mix énergétique optimal basé sur l’accélération des énergies renouvelables et l’augmentation de la part du gaz naturel, comme énergie de transition, en substitution aux autres énergies fossiles, plus polluantes ;
  • accélérer la réforme des entreprises et établissements publics opérant dans le secteur de l’énergie pour accompagner la nouvelle stratégie de l’énergie.
  • Renforcer la souveraineté énergétique du Maroc. Le CESE préconise pour cela de :
  • mettre en place une gouvernance partagée et élargie pour les grands projets structurants du secteur de l’énergie (GME- Gazoduc Nigéria Maroc, infrastructures, etc.), pour éviter le travail en silos et faire participer l’ensemble des parties et compétences concernées ;
  • procéder à une évaluation approfondie de l’opportunité de construire un terminal de regazéification du gaz naturel liquéfié en se basant sur l’évolution future de la demande nationale en gaz naturel et en choisissant l’investissement le moins coûteux pour sa construction, à travers notamment la mise en place des partenariats public-privé ;
  • accélérer la réalisation du projet de la dorsale atlantique reliant le Maroc à la Mauritanie et au Sénégal, composante du projet du Gazoduc Maroc-Nigéria ;
  • accélérer la mise en place du dispositif national chargé de la gestion des stocks de sécurité des produits énergétiques ;
  • mettre en œuvre une politique coordonnée pour l’efficacité énergétique.
  • Renforcer la position du Maroc sur le marché des énergies renouvelables en :
  • accélérant la réforme de la loi encadrant le secteur des énergies renouvelables et celle relative à l’autoproduction d’électricité et de leurs textes d’application, et en veillant à impliquer dans le processus, les acteurs du secteur des énergies renouvelables ;
  • libéralisant totalement le secteur de l’électricité renouvelable et en instaurant des règles claires et transparentes susceptibles de créer une réelle dynamique de développement des énergies renouvelables et d’attirer les investissements internationaux ;
  • développant une feuille de route commune pour une offre d’électricité renouvelable, territorialisée et compétitive, dédiée aux industriels et aux entreprises marocaines exportatrices, et ce, en vue de faire face à la taxe carbone instaurée par l’Union européenne à partir de 2023.
  • Diversifier le bouquet énergétique à travers l’accélération du développement de la filière de l’hydrogène vert, l’accélération de la valorisation énergétique de la biomasse et l’étude de l’opportunité du développement de l’énergie nucléaire.

Dans le cadre du présent rapport, le CESE a jugé opportun de consacrer le focus de cette année à la question du télétravail. En effet, la pandémie COVID-19 et les mesures de confinement qui l’ont accompagnée, ont impacté non seulement les équilibres économiques mais également les rapports sociaux et conditions de vie partout dans le monde. Cette situation a incité de nombreuses entreprises à instaurer le télétravail à grande échelle, amorçant ainsi un changement structurel et une nouvelle réalité dans les lieux de travail. Au Maroc, l’usage de cette nouvelle forme d’organisation du travail a été favorisé par la crise Covid-19 et semble, selon le HCP, concerner principalement le secteur des services et la catégorie socio-professionnelle des cadres. 

L’objectif principal du focus a été d’examiner la question du développement du télétravail dans le contexte marocain, en vue de déterminer s’il s’agit d’un phénomène émergent ou de transition lié à la crise sanitaire, d’explorer ses avantages et inconvénients et d’examiner dans quelle mesure il serait porteur d’opportunités ou de risques. En tirant profit des enseignements des expériences aux niveaux mondial et national, le CESE recommande ainsi de :

  • revoir le projet de décret sur le télétravail au niveau des administrations publiques et en accélerer, autant que possible, l’adoption, en veillant à l’intégrer comme mode d’organisation à part entière, parallèlement au mode présentiel et ce, en concertation avec les partenaires sociaux ;
  • adapter le code du travail aux particularités du télétravail, en intégrant ce sujet niveau de l’agenda du dialogue social ;
  • repenser les modalités d’octroi des services par l’administration publique en intégrant la composante télétravail et mettre en place les infrastructures nécessaires pour mieux collaborer et communiquer ;
  • encourager la création d’espaces de coworking dans le secteur public pour favoriser les échanges entre fonctionnaires de différents départements ministériels, limiter les déplacements et décongestionner les grandes villes ;
  • améliorer et réduire le coût de l’internet haut débit, notamment dans les zones reculées ;
  • promouvoir la création d’un observatoire mixte (patronat, syndicat, HCP et universités), avec pour objectifs d’éclairer les parties prenantes sur les facteurs de blocage et de réussite propre à la réalité marocaine dans ce domaine.

Pour ce qui est de la dernière partie du rapport, consacrée aux activités du Conseil économique, social et environnemental en 2021, le bilan établi permet de relever les réalisations suivantes : D’abord, le CESE a réalisé quatre saisines émanant : 

  • du chef du gouvernement intitulée : « avis du CESE sur le projet-de-loi n°24.19-relative aux-organisations-syndicales» ;
  • de la chambre des représentants, intitulée : « la performance des services de l’Etat gérés de manière autonome les services d’Etat gérés d’une manière autonome – SEGMA» ; 
  • de la chambre des conseillers, intitulées : « renforcer et élargir la classe moyenne au Maroc : enjeux et voies pour une classe moyenne qualifiée, épanouie et entreprenante » et « indemnité pour perte d’emploi : quelles alternatives à la lumière de la loi-cadre sur la protection sociale ?».

En plus du « rapport annuel au titre de l’année 2020 », le CESE a réalisé 7 avis dans le cadre des auto-saisines. Les thématiques de ces auto-saisines sont les suivantes : 

  • « une approche intégrée pour résorber l’économie informelle au Maroc » ;
  • « l’intégration économique et sociale des marchands ambulants » ;
  • « faire face aux conduites addictives : état des lieux & recommandations » ;
  • « mobilité durable : vers des moyens de transport durables et accessibles » ;
  • « pour une nouvelle vision de gestion et de valorisation du patrimoine culturel » ; 
  • « vers une transformation digitale responsable et inclusive » ;
  • « pour une approche novatrice et intégrée de la commercialisation des produits agricoles ».

Par ailleurs, le CESE s’est penché au titre de l’année 2021 à l’élaboration du son bilan décennal. Il s’agit d’une évaluation rétrospective et prospective de l’action du CESE qui vise à :

  • mettre en exergue et capitaliser sur les réalisations cumulées par le CESE sur le plan de la production des idées, des connaissances et des analyses, ainsi qu’au niveau institutionnel et managérial ; 
  • mettre en avant les différentes contributions du Conseil dans la promotion de la situation économique, sociale et environnementale au Maroc ainsi que le rôle qu’il a joué pour initier ou enrichir la réflexion sur un certain nombre de problématiques cruciales pour notre pays ;
  • valoriser l’expertise nationale développée par le CESE depuis sa création ;  
  • porter un regard prospectif sur l’action du CESE. 

Dans le cadre de son plan d’action au titre de l’année 2022, le Conseil traitera, en plus du rapport annuel, les thématiques relatives à «la santé mentale et les causes de suicide au Maroc», à «l’évaluation des programmes destinés aux jeunes durant le mandat gouvernemental 2016-2021», à «l’économie du sport», à «l’économie circulaire», à «l’aménagement durable du littoral», au «transfert des compétences et du savoir au sein des institutions», à « la valorisation du capital humain», à «la réforme du secteur public au service du développement territorial», aux «métaux stratégiques» ; à «la biodiversité et développement socio-économique des écosystèmes forestiers  ainsi qu’aux «fausses informations» (fake news) . 

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